Les vers de terre, travailleurs infatigables

Vous pensez être un bon jardinier ? En fait, ce sont les vers de terre qui jardinent pour vous… Ils sont la condition sine qua none d’une bonne fertilité au jardin.

Sans vers, pas de vie (ou très peu) dans le sol…

C’est en survolant la liste des sujets déjà abordés sur le blog que j’ai pris conscience de cette coupable omission de ma part !

Car il s’agit bien là d’une base essentielle au jardinage naturel.

Certes, j’en ai parlé maintes fois au détour de tel ou tel article consacré à la fertilisation ou plus précisément aux matières organiques… Mais rendons aujourd’hui justice aux vers de terre en leur consacrant un article plus complet.

Commençons par faire un peu mieux connaissance avec ce petit animal.

Qu’est-ce qu’un ver de terre ?

Le ver de terre appartient évidemment à l’ordre animal (comme nous…) et se classe dans l’embranchement des annélides (sous-ordre : Lumbricina).

Bien que forts discrets, les vers de terre constituent, en termes de masse totale, la population la plus importante sur cette Terre.

Pour vous donner un ordre d’idée, la totalité des vers de terre pèse environ 20 fois la population humaine mondiale !

Dans une prairie, dont le sol n’est nullement perturbé par l’activité humaine, on en compte 100 à 250 au m².

Mais dans une terre cultivée, même correctement amendée, on en dénombrera au mieux qu’une centaine au m².

Vous comprendrez déjà l’impact négatif qu’a inévitablement le travail de la terre…

Les vers sont de ce fait de précieux bio-indicateurs de l’état d’un sol.

Et il est de notre devoir de tout au moins limiter les dégâts !

Différentes catégories de vers de terre

Au niveau du jardin, nous distinguons 3 catégories de vers de terre*, en fonction de leur zone de développement dans le sol, et par conséquent de leurs implications écologiques :

Les vers épigés

vers de compost (épigés)
ver épigé (Eisenia foetida ou ver rouge)

Ce sont les vers de petite taille (1 à 3 cm) vivant au-dessus du sol, dans les herbes, dans le paillage et plus encore dans le compost ou le fumier. Les vers de compost sont des « eisenias », faisant partie des épigés.

Leur rôle premier consiste avant tout à décomposer les matières organiques, animales et végétales, laissées en surface.

En zone tempérée européenne, les épigés représentent moins de 1 % de la biomasse totale des vers de terre.

 

Les vers anéciques

ver de terre anécique
Ver de terre anécique (lumbricus terrestris ou lombric terrestre)

Ce sont de loin les plus nombreux (autour de 80 % de la biomasse totale de vers de terre).

Ils sont aussi les plus longs (ils peuvent mesurer plus de 1 mètre pour certains !).

Ces vers sont également les plus actifs dans le sol.

Ce sont en effet les anéciques qui vont creuser de nombreuses galeries verticales (jusqu’à 1 mètre de profondeur).

Ils remonteront (surtout la nuit) afin de venir chercher leur nourriture en surface.

 

Les vers endogés

ver de terre endogé
Ver endogé (Aporrectodéa icteria – Crédit photo)

Ils constituent environ 19 % de la biomasse de vers de terre.

Ce sont des vers de couleur claire (presque blanchâtre).

Ils se déplacent horizontalement dans le sol (ne remontant que rarement en surface).

Ils vont donc constituer des galeries horizontales complétant le réseau de galeries constitué par les vers anéciques.

 

(Attention à des nouveaux envahisseurs : les plathelminthes terrestres).

 

* Cette classification écologique, établie par Marcel Bouché en 1971, peut prêter à discussion. Mais elle montre parfaitement la complémentarité de champs d’action entre les différents types de vers.

Et c’est bien ce qui nous intéresse ici…

Quels rôles jouent les vers dans le sol ?

Les vers de terre retournent le sol

En ingérant et digérant des volumes incroyables de terre (on parle ici de 270 kg de sol transitant par les tubes digestifs d’1 kg de vers de terre chaque année !), les vers vont la retourner et la mélanger très finement.

Et contrairement aux motoculteurs ou à la charrue, cela se fait sans remonter d’éventuels cailloux ni tasser le sol en profondeur (notons ici que la Grelinette ou la Campagnole présentent, tout comme nos chers vers, cet avantage)… sans parler de l’impact environnemental des carburants.

Les vers aèrent le sol

De par les innombrables galeries qu’ils vont creuser (verticales pour les anéciques et horizontales pour les endogés), les vers de terre aèrent le sol et permettent ainsi :

  • Un meilleur drainage (en empruntant les galeries, l’eau pénètre facilement en profondeur) tout en constituant des réserves d’eau dans le sol (réserves dans lesquelles les racines des végétaux pourront puiser) ;
  • Un meilleur enracinement des cultures : les racines des plantes vont profiter des galeries pour s’étaler dans le sol (pas de « contrainte » mécanique, oxygène à disposition)

Les vers enrichissent le sol

Vous avez peut-être déjà observé, en surface du sol, ce que l’on appelle turricules (ou tortillons) ?

Ce sont les déjections remontées en surface par les vers anéciques.

Ces déjections sont particulièrement riches en éléments minéraux (azote, potasse, phosphore, calcium, magnésium, etc.), mais également en bactéries utiles (elles permettent notamment la formation de petits agglomérats de terre, qui sont eux-mêmes favorables au drainage du sol).

Elles contribuent de fait à enrichir le sol.

 

Vous l’aurez compris : les vers de terre sont indispensables à la vie du sol.

Les protéger et favoriser le développement de leurs populations constitue donc un devoir. Je dirais même une mission, pour le jardinier !

Comment favoriser la venue et le développement des populations des vers de terre ?

Respectez la vie du sol pour préserver les vers de terre

Avant de penser à développer les populations de vers dans le sol de notre potager naturel, commençons déjà par ne pas les détruire…

Dans cette optique, une couverture permanente du sol est un idéal à viser.

Évitez le motoculteur

Mais il est parfois utile, voire indispensable, de travailler la terre…

Je pense en particulier ici à la création d’un potager, ou de nouvelles parcelles, sur une terre fortement tassée ou déstructurée (terre de remblais par exemple).

Ou encore pour des semis directs dans une terre non encore ameublie…

Dans ce cas, utilisez de préférence des outils respectueux de la vie du sol, comme la Grelinette ou la Campagnole.

Mais évitez, autant que faire se peut, d’utiliser des engins motorisés pour travailler la terre de votre potager.

Bannissez la bouillie bordelaise

Il est également important de rappeler ici que la bouillie bordelaise engendrera une accumulation de cuivre dans le sol.

Or, ce cuivre empoisonne littéralement les vers de terre…

Une catastrophe donc !

Heureusement, il y a des alternatives à la bouillie bordelaise (je les présente dans cet article consacré au mildiou).

Apportez des matières organiques diverses et variées

Les matériaux à votre disposition pour rendre, peu à peu, votre terre vivante et fertile, ne manquent pas…

Vous en trouverez soit directement au niveau de votre jardin, soit dans le voisinage.

Épandez du compost, du fumier, des feuilles mortes, des tontes, des déchets de débroussaillages, du foin, de la paille, des branchages (BRF), des déchets végétaux de cuisine, des herbes arrachées des planches de culture, des feuilles d’ortie ou de consoude, du marc de café, des résidus de récoltes, des engrais verts…

Il n’y a pas de secret, les vers de terre se multiplieront alors dans le sol de votre jardin.

Mais attention…

Tenez compte des caractéristiques du sol de votre jardin

Selon le type de sol, des apports inappropriés, soit de par la nature même du matériau utilisé, soit en raison de quantités excessives, pourront produire l’effet inverse de celui recherché.

C’est-à-dire nuire à la vie du sol plutôt que de la favoriser…

Par exemple, un apport trop copieux de BRF sur une terre argileuse risque fort d’y bloquer le développement de la vie.

De même des tontes apportées en couche épaisse sur une terre peu vivante vont probablement pourrir en surface, au lieu de se décomposer sainement… Ce n’est bien sûr pas l’effet recherché.

Dans un autre registre, une culture d’engrais verts dans une terre sablonneuse, pauvre de nature, puisera dans les faibles réserves qu’elle contient… Au détriment de la culture qui suivra… Bien que ne nuisant pas réellement à la vie du sol, cette pratique est donc en général à éviter pour une telle terre. Je dis en général… Car une culture d’engrais verts dans une terre pauvre pourra quand même être utile si celle est également fortement tassée, afin justement de la décompacter…

 

Bref, les apports de matières organiques sont bénéfiques à la vie du sol, à condition de ne pas faire n’importe quoi (évitez notamment des enfouir si elles ne sont pas décomposées)…

Mon Potager au Naturel a été justement conçu dans ce but.

Partant de la connaissance de la terre de votre jardin (grâce à des tests gratuits et simples à réaliser), vous saurez quels matériaux utiliser, quand les épandre, et en quelles quantités, ceci en fonction des caractéristiques de cette terre.

En conclusion

Si vous apportez régulièrement des matières organiques sur votre terre, les vers ne tarderont pas à coloniser votre sol… Ils œuvreront pour vous à sa fertilité.

Vous ne manquerez pas de les en remercier en continuant à leur apporter régulièrement de la nourriture !

Toutefois, même si vous pourrez constater de premiers effets bénéfiques en une seule saison (apparition de quelques individus alors que vous n’en voyiez aucun auparavant…), arriver à un niveau correct en termes de populations de vers de terre pourra parfois, dans certaines situations de terre particulièrement pauvre ou malmenée, demander quelques années…

En attendant d’obtenir une terre vivante et fertile, dans laquelle les vers de terre pulluleront, la consoude vous permettra d’obtenir de très belles récoltes (ou d’encore plus belles si votre terre est déjà bien vivante…).

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